23 mai 2012

Crimes horticoles

Auteur : Mélanie Vincelette
Titre : Crimes horticoles
Éditeur : Points
Parution : 2011
Format : 175 pages



Résumé :

Au large d'un village d'épinettes, dans le squelette d'un motel abandonné, vit Émile et sa famille excentrique. 

Émile est une fille de 12 ans au prénom atypique qui se raconte des histoires dans ce lieu isolé, qu'elle partage avec un père cultivateur de pavot et une mère cartomancienne. La gamine rêve de partir pour le Maroc avec son ami Liam, un vieux peintre qui a élu domicile dans la grange. Elle passe ses journées à lire des encyclopédies pour découvrir les peuples et les légendes du monde, puis elle part se baigner dans la rivière rouge, en attendant de vivre le grand amour. 

Autour d'elle, une kyrielle de gitans, de saltimbanques et d'âmes perdues s'entrecroisent dans ce livre aux allures de caravanes et de greniers magiques.

Ce que j'ai aimé : 

-J'ai été séduite par le vocabulaire coloré et l'imaginaire débridé de l'auteure. Un univers éclaté et éclectique. Un style qui m'a rappelé Réjean Ducharme et Sylvain Trudel, par sa façon de fabuler le réel. Dans le quotidien d'Émile, on part tous les jours à l'aventure, on rêve grand, on découvre. Le regard d'une enfance un peu solitaire, mais à la fois très lucide sur le monde des adultes qui l'entoure.

-Ce roman multiplie les références à des peuples énigmatiques des quatre coins de la planète. La jeune fille nous transmet sa curiosité, son esprit nomade et son goût du voyage. On apprend beaucoup de choses aussi. Cet exotisme est mis en contraste avec la communauté dans laquelle évolue Émile, isolée dans les bois, loin de tout. Le petit village de La Conception reste un endroit mystérieux, avec des habitants au passé pas toujours clair, des visiteurs de passage. Cela donne une ambiance métissée au roman qui est très intéressante.

-Chaque phrase est travaillée comme une petite pièce d'orfèvrerie. C'est détaillé, riche, vivant. On sent que l'auteure aime les mots et est fascinée par le monde qui l'entoure. Je suis bien contente d'avoir découvert l'écriture de Mélanie Vincelette, qui m'a charmée par son dynamisme et son inventivité.

Extraits favoris :

« Eduardo Luna, comme le premier homme sur terre, sur les berges de la rivière Rouge, mangeant des fraises en boulimique effrayé. Je ne sais pas pourquoi, mais en sa présence inespérée j'ai eu l'impression que je pouvais devenir quelqu'un. Une danseuse du ventre portant sa dot en pièces d'or sur ses hanches, un banquier séfarade, un dentiste attendant ses clients sur un tabouret d'une place publique de Delhi. Depuis, tous les soirs, la lune ronde comme un pamplemousse, lourde de ses océans, me parle de lui. »

 « On dit que sa mère, Anise, venait peut-être de l'Inde, peut-être de Chine, ici on ne connaît pas vraiment la différence entre les deux. Nila est mon amie dans l'abandon. Elle a des yeux opalins, dont l'iris semble être redessiné chaque nuit à l'encre noire. Quand elle transpire, il émane de son corps une odeur de céleri. »

« Je ne peux plus revenir en arrière, maintenant. Il ne me reste plus rien. Je vis avec des étrangers. Je n'ai plus de protecteur. Je suis une caverne vide. Je n'ai plus personne avec qui écouter la pluie tomber, la nature bouger. Rien. Il ne me reste que son cimetière dans la poitrine. »

« Pour mes douze ans, Liam m'a donné le plus merveilleux des cadeaux : l'attente.  »
 

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