18 août 2013

Du coeur à l'établi

Auteur : Michel-Olivier Gasse
Titre : Du coeur à l'établi
Éditeur : Tête Première
Parution : 2013
Format : 350 pages

Résumé :

C'est un roman un peu râpeux, comme du bran de scie. Une écriture franche, chaleureuse, qui pourrait rappeler la dégaine de Lucien Francoeur. Il y a un côté attachant dans cet univers sans prétention, fait de vieux bonhommes bedonnants, d'errances au petit matin, de testostérone décontractée, avec juste ce qu'il faut de sensualité et de distorsion. L'auteur Michel-Olivier Gasse, bassiste pour divers groupes montréalais, a certainement puisé dans un milieu riche en anecdotes pour nous offrir ce récit débridé.

Ce que j'ai aimé :

Manu Camacho répare des guitares usées, sous l'oeil attentif de son patron, le gros Jean Lemieux, dans sa boutique fréquentée par des habitués, des piliers. Le soir venu, il enfourche son vélo, se défoule en pédalant à toute vitesse, avant de fumer un joint sur son balcon avec son frère. Pas particulièrement chanceux avec les filles, le jeune trentenaire mène une vie tranquille et sans grandes ambitions.

Suite à une altercation avec un chauffeur enragé, Manu fera la rencontre de Paré, un cow-boy de la ville sorti de nulle part pour lui venir en aide, aux histoires légendaires, ayant comme seule monture un vieux bazou. En compagnie de Lou, la meilleure amie de Manu, ils nous transporteront l'espace d'un été, sur la route des projets douteux, poivrée de transactions de drogue et de bagarres impromptues.

« J'ai vu la mort et j'ai plongé dans la vie. Je me suis fait des amis que je n'ai pas choisis et j'ai la ferme intention de les garder pour de bon. Je me suis mouillé et j'ai peur que ça se mette à me manquer. »

Ici, ce n'est pas la loi, ni la doctrine, qui domine. À la manière de Kerouac, la vie fait la loi, l'expérience guide l'existence, sans adhérer à une cause particulière ou un plan précis. Cela donne lieu à des scènes parfois exagérées, mais soutenues par un rythme divertissant.

L'ambiance demeure montréalaise, semblable aux bars miteux sur « La Main », mais il y a tout de même un sentiment régional qui s'en dégage. Des dialogues avec de la repartie, des descentes du coude, qui coulent aussi bien qu'une bonne bière froide par une chaude soirée de juillet.

L'amitié occupe une grande place dans ce voyage initiatique. Même si son influence n'est pas toujours recommandable, elle permettra au personnage principal de vivre des aventures qui le sortiront de son inertie, le poussant à aborder une fille téméraire et à vouloir faire quelque chose de sa peau.

« Camacho, c'est portugais. Pas mal tout ce que je peux avoir d'exotique. »

J'ai été particulièrement touchée par la solidité des liens familiaux qui unissent les Camacho. Il s'agit d'une troupe bien sympathique, formée d'un père portugais, d'une mère québécoise et de trois frères habitant le même immeuble. En insufflant une essence rock dans cette trame quotidienne, Michel-Olivier Gasse nous rejoint par le coeur, en dosant bien l'humour, l'émotion et les déboires.

Extrait favori :

« Mais le soir, quand je le rejoins pour fumer sur la galerie commune en arrière, quand on regarde la ruelle sans rien dire et qu'on laisse Neil Young dans le salon parler à notre place, je me dis qu'au moins, à ce moment-là, on a quelque chose à voir ensemble. Alors que les futurs époux, juste en-dessous, se préparent à se coucher pour être en forme le lendemain. »

Lu dans le cadre de La recrue du mois


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