25 septembre 2013

Maisons pour touristes

Auteur : Bertrand Bergeron
Titre : Maisons pour touristes
Éditeur : L'instant même
Parution : 1988
Format : 132 pages



Résumé :

Dans ce recueil de nouvelles, lauréat du Prix Adrienne-Choquette en 1988, Bertrand Bergeron nous transporte vers des lieux où les personnages ne sont que de passage. Des chambres d'hôtel, des vestibules anonymes, tendent une toile de fond pour ces êtres qui se croisent, hasardent un rapprochement, puis repartent, en proie à leur labyrinthe intérieur. Que ce soit des vacanciers, des élégantes femmes énigmatiques ou des amants incertains, ils se déplacent dans un univers intemporel, nébuleux et introspectif des plus fascinants. Une très belle découverte !

Ce que j'ai aimé :

-Selon des spécialistes, plusieurs nouvellistes québécois des années 1980 ont été marqués par la nouvelle latino-américaine, s'inspirant notamment de Borges, Cortázar, Ocampo et Casarès. En effet, on retrouve une parenté dans le style de Bertrand Bergeron, façonné de belles et longues phrases fleuves, hypnotiques et vaporeuses. J'ai eu un véritable coup de coeur pour sa composition syntaxique, où intervient l'art du non-finito, exprimant des désirs, des hésitations, des discours inachevés. Cela donne un ton très musical et enfumé, entre jazz et subconscient. En somme, il s'agit d'une lecture qui demande de l'attention, considérant sa densité et ses nombreux changements narratifs, mais qui m'a complètement envoûtée par son rythme et son souffle.

-Outre le thème de l'errance, je trouve que l'incommunicabilité est très présente dans ce recueil, contenant peu de dialogues. L'auteur utilise plutôt la narration indirecte libre, portant la voix du narrateur et des personnages à se mélanger. Les protagonistes se confient par des regards furtifs, des gestes remplis de sensualité, mais ils ne parviennent pas à une réelle compréhension de l'autre. Cette barrière invisible devient presque palpable, comme un épais brouillard de pensées, de pudeur et de craintes. Bertrand Bergeron entretient également un certain flou autour de l'identité, transformant des rencontres en danses poétiques. Malgré cette évanescence, la conception des nouvelles suit un tracé brillamment planifié, une subtile structure, que j'ai aimé lire et relire.

Extrait favori :

« On a bien l'impression qu'il vous écoute, n'aie pas peur tu ne risques rien depuis longtemps, je t'assure, depuis longtemps je n'ai pas. Le timbre devient rauque quand on salive aussi peu à dire n'aie pas peur, quand on l'entend comme s'il savait être encore raisonnable alors que ses mains sur des épaules données, alors que son regard vous le savez sur vos lèvres disjointes, tout chez vous prend à ses yeux une importance telle que son regard n'importe où, sur vos lèvres pourquoi pas, vous vous sentez à présent toute dans ce regard sous des mains qui hésitent. »

Lu dans le cadre de Québec en septembre 


8 commentaires:

  1. Ça a l'air intéressant. Je ne savais pas que les nouvellistes québécois de cette époque avaient été inspirés par la nouvelle latino-américaine.

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    1. Oui, cela m'a surprise également ! Il semblerait que cette ouverture leur a permis de renouveler leur pratique de la nouvelle. En tout cas, ça donne envie de lire ces modèles aussi ! :)

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  2. Tiens un recueil que je vais sans aucun doute apprécié car j'aime aussi l'inachevé qui laisse place à l'imaginaire. Je note.

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    1. Je crois que cela pourrait te plaire, car c'est tout à faire ce genre de lecture. Malgré ces phrases inachevées, notre esprit parvient à combler les trous, grâce au contexte qui les entoure. Fascinant ! :)

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  3. Et bien je sais maintenant où trouver des idées lecture de nouvelles maintenant.

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    1. J'aime beaucoup les nouvelles, car elles sont souvent de petits chefs-d'oeuvre. Je suis ravie si cela te donne des idées lecture ! :)

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  4. Très beau billet! Mais je ne suis pas très "nouvelles"... Un jour, je développerai ce goût. J'espère!

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    1. J'ose te suggérer un recueil : Le peignoir, de Suzanne Myre. Il est vraiment très drôle ! Merci pour ta belle visite :)

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